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Philippe Guerreiro
Crédits photo : © Philippe Levy

Philippe Guerreiro

Régisseur général

"Il y a cet instant crucial, juste avant l'entrée sur scène de l'artiste et son premier morceau, quand je demande House Light. C'est là que la magie se met en place."

 

Les débuts

"Ce sont les hasards de la vie qui m'ont mené à faire ce métier. J'ai passé un bac D maths-sciences nat', un DUT tech' de co, je suis parti en fac de lettres, et au même moment, avec des amis, on a monté un petit groupe de rock sur Besançon. Ça s'appelait les Raoul's J'te Pousse ! Comme je ne jouais pas d'instrument, j'ai commencé à monter des dossiers, à organiser des tournées dans toute la France, en Suisse, en Belgique ;  et j'ai remporté deux fois les Défis Jeunes pour autoproduire un disque, puis une tournée. On a donc loué un van, la sono, un peu de lights, le backline, et on est parti faire la tournée des clubs de France. Ça a duré quatre ou cinq ans. Ensuite, j'ai fait des rencontres plus professionnelles qui m'ont amené à quitter ma province, pas à 18 ans comme Aznavour, mais à 25, le cœur léger et le bagage pas si mince Mon premier show de tournée, c'était à Paris, c'était Daran  en 95."

 

Partis pris

"La vie a fait que j'ai plus travaillé avec des artistes étrangers, avec une petite préférence pour les Anglais. Les Anglais, c'est oui ou non et on s'y tient : ils sont exigeants avec nous, du coup on peut l'être avec eux. Avec les Américains, c’est plus compliqué car il y a l'entourage à passer. Et puis je pense qu'ils doutent un peu de la France… Ils ne sont pas certains qu'on a l'électricité nécessaire pour faire un concert, sans parler des toilettes dans le jardin ! Mais j'ai quand même de très bonnes relations avec certains groupes américains, comme Midlake, avec qui j'ai passé du bon temps en tournée."

 

Anecdote live

" On est à la Mutualité avec Nick Cave. Tout se passe bien en balance, pareil pour la première partie, puis il monte sur scène et là, bim : coupure totale, plus de lumière, plus de son ! À l'époque, il y avait des laboratoires d'analyses au-dessus de la salle qui tiraient beaucoup de jus la nuit, ce qu'on ne voyait pas sur les relevés EDF de la journée. C'est reparti au bout de trois essais… Avec le régisseur hollandais de Nick Cave, on était à genoux en train de prier ! "

 

" Il est 20h30 à Rock En Seine, je suis avec l'agent de sécurité d'Oasis en train de repérer le chemin qui monte à la scène. Le premier frangin rentre, puis le deuxième et là c'est le chaos. Ils ont commencé à s’insulter copieusement, Liam s'est mis à péter les guitares de Noel, qui finalement s’est tiré avec son bodyguard. Comme on était en tête d'affiche, sur le coup, personne n'a pu nous aider à démonter, il a fallu attendre la fin du festival. Bilan : un grand moment de solitude et un beau gâchis pour tout le monde."

 

Le Temps fort 

" Indéniablement, il y a l'ouverture d'un lieu au public. Quand tu ouvres les portes de Bercy ou du Stade de France, que tout le monde est à son poste, c'est vraiment un moment à part où tous les sens sont en éveil. Et puis, il y a cet instant crucial, juste avant l'entrée sur scène de l'artiste et son premier morceau, quand je demande de faire le noir dans la salle. C'est là que la magie se met en place."

 

Le Coup de blues

" Quand je pars travailler, je n'ai pas l'impression d'aller à la mine. Pourtant ça commence tôt le matin, ça finit tard le soir et c'est physiquement rude. On bosse dans le froid, la chaleur, sous la pluie. Mon rôle est de tout anticiper, parce que s’il y a un problème, c'est moi qu'on interroge en premier. Les artistes, ils sont plus ou moins faciles à gérer. Par exemple, j'ai passé beaucoup de temps avec Peter Doherty depuis 12 ans et c’est pas simple tous les jours. Il y a des grandes périodes de ras-le-bol et puis des moments de grâce où quelque chose se passe... Et c'est reparti pour un tour !"

 

#PLUSQUEJAMAIS

"Il va falloir redonner envie aux gens de sortir, de venir au spectacle en les mettant en sécurité. C'est parfois contraire à l'idée de liberté qu'il y a dans la musique, mais c'est nécessaire pour rassurer. Il faudra tenir les horaires, avoir des établissements clean, une sécurité aimable à l'entrée. Mais je suis foncièrement un optimiste. J'ai 46 ans et j'ai envie de travailler encore longtemps et de voir beaucoup de gamins se marrer dans les concerts. Mon fils a huit ans et demi et j'espère qu'il ira voir des concerts au Bataclan. J'en suis même persuadé."

 
Interview réalisée par Michael Patin